Se distraire

Saga : l’industrie de la télé par un pro du suspense

Oh oh. Et moi qui allait dire que j’étais prête à pardonner à ce roman son franchouillard insupportable parce que c’était une traduction. Mais non, Tonino Benacquista est français. Et moi qui pensait qu’avec un nom pareil, il était italien…

Mais bon, c’est bien la pire chose que j’ai à reprocher à ce roman. L’idée de fond est géniale : quatre wannabe scénaristes se font offrir le premier vrai contrat de leur vie; remplir les quotas de diffusion avec Saga, une série que personne n’écoutera, diffusée entre 4 et 5 heures du matin. Aucun budget, aucun décor, interdit de tourner à l’extérieur, mais sinon, aucune contrainte. Leur mot d’ordre : “Faites n’importe quoi.” Ils s’en donnent à coeur joie. Jusqu’à ce que, à la surprise de tous, la série batte tous les records d’écoute de l’histoire.

Au tout début, je me suis fait prendre au jeu. Je me suis dit que l’histoire consistait tout simplement à suivre la Saga en même temps que les scénaristes la rédigeaient, que ça n’irait nulle part, et que ce serait décourageant. Je n’ai toujours pas appris de mes centaines de lectures… Évidemment, c’est impossible de garder le fil de la Saga. Il y a beaucoup trop de personnages, leurs péripéties sont sans queue ni tête, et on saute par-dessus des dizaines d’épisodes. Bien sûr que ce n’était pas ça l’important.

L’important, c’est tout ce qui vient après, vers la moitié du livre. Quand la série obtient un tel succès que tout à coup, les scénaristes ne peuvent plus faire ce qu’ils veulent car elle devient une affaire d’État. Quand les lettres d’admiration pleuvent, quand les scénaristes deviennent tout à coup très riches, puis quand ils se rendent compte de leur pouvoir et se mettent à menacer leur patron. Quand ils se rendent compte que ce qui n’était pour eux que de la fiction, que du délire d’imagination, touche le corps et l’esprit de millions de gens, et qu’au moindre faux pas, c’est la France entière qui est contre eux. À partir de là, tout déboule, et j’ai dévoré d’une traite.

Si ce n’était du texte qui semblait sortir d’un mauvais film d’action doublé en français de France, j’aurais donné une note excellente. Mais si je ne peux même pas donner à l’auteur le bénéfice du doute…


SAGA

Tonino Benacquista

15,26 $