Classiques,  Se distraire

Manon Lescaut

Un de mes cours de littérature préférés au baccalauréat portait sur la littérature du 17e-18e siècles. Les romans tels qu’on les connait aujourd’hui commençaient à faire leur apparition, et j’ai trouvé fascinant de voir les valeurs qui y étaient véhiculées, et surtout la manière dont elles étaient véhiculées. J’y avais lu entre autres un extrait de Manon Lescaut tellement dramatique et grossier qu’il ne m’était pas sorti de la tête. Je suis bien contente d’être allée jusqu’au bout de ma curiosité.

Résumé

Le chevalier des Grieux, jeune homme prometteur de bonne famille, est perdu la minute où il voit Manon pour la première fois. C’est comme ça que l’amour fonctionne, c’est bien connu. Heureusement pour lui (ou pas, selon la manière dont on interprète le reste de l’histoire), son amour est réciproque. Le problème, c’est qu’au moment où il la rencontre, elle est en route vers un couvent où ses parents l’envoient. La fuite est leur seule solution pour pouvoir vivre leur amour; ils s’y apprêtent donc.

Après quelques semaines de parfait bonheur et de plaisirs non bibliques, la question de l’argent devient pressante. Manon se propose de s’occuper de la question. Le chevalier des Grieux, qui lui accordait jusqu’alors sa pleine confiance, réalise peu après qu’elle fréquente un vieil homme riche, et le soir même de sa découverte, des laquais viennent le saisir pour le retourner dans sa famille. Trompé et confus, il passe six mois de douleurs et, sous les conseils de son père, renoue avec les études et la vertu.

Mais l’emprise de Manon ne s’arrête pas là. Il la recroise un soir, et il redevient complètement éperdu. Il lui pardonne et renoue avec le vice et les plaisirs de la chair malgré les exhortations de ses proches. Les problèmes d’argent reviennent, et Manon, sans surprise, a recours aux mêmes moyens pour remplir leur bourse.

Manon n’utilise-t-elle les hommes, le chevalier y compris, que pour satisfaire ses plaisirs volages, ou croit-elle vraiment qu’elle agit pour leur meilleur intérêt à tous les deux? Au lecteur d’en juger. Ce qui est certain, c’est que malgré tous les malheurs dans lesquels les amants se retrouvent, l’amour du chevalier ne vacillera point.

Impressions

Je me suis grandement amusée en lisant ce livre. C’est une grande aventure rocambolesque, pleine de rebondissements et de drames. Les personnages ne sont pas très attachants (le chevalier des Grieux est franchement pathétique avec son amour aveugle, et Manon me semblait plutôt méchante), mais très distrayants. Ils s’évanouissent, ils pleurent, ils sautent de bonheur, ils sont prêts à mourir l’un pour l’autre… Vous vouliez des émotions, en voilà.

Un autre grand plaisir avec ce genre de romans, ce sont, je l’ai mentionné plus haut, les valeurs des personnages. Leur vision de l’amour et du sexe, bien sûr, mais aussi le rapport qui est fait entre la beauté et la noblesse. Lisez ça :

Parmi les douze filles qui étaient enchaînées six à six par le milieu du corps, il y en avait une dont l’air et la figure étaient si peu conformes à sa condition, qu’en tout autre état je l’eusse prise pour une personne du premier rang.

Manon Lescaut, de l’Abbé Prévost, p. 146-147

Ou encore :

Il était mis fort simplement; mais on distingue, au premier coup d’oeil, un homme qui a de la connaissance et de l’éducation. Je m’approchai de lui. Il se leva; et je découvris dans ses yeux, dans sa figure et dans tous ses mouvements, un air si fin et si noble que je me sentis porté naturellement à lui vouloir du bien.

Manon Lescaut, de l’Abbé Prévost, p. 147-148

Manon Lescaut est un classique de la littérature française du 18e siècle. Si vous voulez vous initier à cette époque, je vous conseille de commencer par lui. Ou, si vous êtes plutôt d’humeur coquine, par Thérèse philosophe, de Jean-Baptiste Boyer d’Argens, que je n’ai malheureusement pas critiqué sur ce blogue à l’époque. Dans les deux cas, je ne crois pas que vous allez regretter.