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La Scouine

Jamais je n’ai été aussi excitée par une lecture obligatoire. Je vous le dis. J’ai dû vérifier que je ne m’étais pas trompée de livre, parce que je ne savais pas que c’était possible de découvrir des auteurs québécois contemporains aussi talentueux par le biais d’un cours de littérature.

Résumé

En 1918, 100 ans avant la parution de La Scouine de Gabriel Marcoux-Chabot, paraissait La Scouine d’Albert Laberge. Je ne l’ai pas lu, mais ce livre est considéré comme le premier roman réaliste québécois. L’auteur y “décrit de manière crue la vie misérable des paysans dans la région de Beauharnois entre 1853 et 1896” (La Presse). L’humour est noir, et l’ignorance et la violence dominent.

Cette Scouine est une réécriture moderne de ce roman centenaire, et l’histoire est apparemment la même. Urgèle et Mâço ont déjà trois enfants quand Mâço donne naissance à des jumelles, Caroline et Paulima. Mais elles sont loin d’être identiques. Caroline a tout pour elle tandis que Paulima est particulièrement moche et s’attire continuellement les railleries. Pour survivre et obtenir un peu d’attention positive dans cette campagne profonde, elle commence à mentir. Toute cette famille subit les vicissitudes de la vie, vieillit, et dépérit.

Impressions

Première chose qui m’a frappée : le roman “rime”. Je ne m’en suis pas rendu compte immédiatement, mais après un moment, je ne voyais que ça. Un exemple :

Son cauchemar n’est pas terminé pour autant. Le surnom que lui a donné François Potvin ce jour-là ne hante pas seulement ses rêves récurrents. Cette interjection vague, surgie d’on ne sait quels abysses du langage, s’est répandue comme une traînée de poudre au village et, à son grand désarroi, il n’est plus un enfant qui ne l’interpelle autrement que par ce sobriquet infamant.

La Scouine, Gabriel Marcoux-Chabot, chapitre VIII

Ça donne un rythme vraiment entraînant au roman. Quand on combine ça avec l’histoire macabre et fascinante, ça devient vraiment très difficile d’arrêter. Il faut s’en arracher pour aller se coucher.

Et puis, il y a la langue. Un bon québécois très marqué dans les dialogues, délicieux à réciter à voix haute.

– Où c’tu vas?

– Là-bas. Pas loin.

– J’peux-ti vnir aec toé?

– Non.

La Scouine, Gabriel Marcoux-Chabot, p. XIX

Tout dans ce livre est malaisant. Les personnages vivent dans la misère noire, ils ne se lavent pas souvent, ont une éducation très minimale, leur morale est douteuse, et ça fait trop longtemps qu’ils refoulent leur sexualité. Et pourtant, il y a quelque chose qui fait que c’est comique. Ce n’est donc pas une lecture lourde. Mais ça vient nous remuer un peu.

Une très belle découverte. Je vous la recommande.